+32 84 41 17 25
LA BELGIQUE PROTEGE SA NEUTRALITE
La Belgique, pays neutre de par la volonté des nations européennes qui ratifièrent son indépendance en 1831, se devait d’interdire le passage sur ses terres de toute nation qui voudrait y passer pour en attaquer une autre.
C’est pourquoi elle entreprit dès 1887 la construction d’une ceinture de forts autour de Liège (face à l’Allemagne) et de Namur (face à la France). C’est le Général Brialmont qui assumait la responsabilité de l’édification de ces ouvrages défensifs.
Ces forts servirent une première fois en 1914.
La portée et la puissance de l’artillerie ayant fortement augmenté, il fut décidé en 1936 de renforcer les anciens forts et d’en construire quatre nouveaux, plus éloignés de Liège et mieux adaptés. Aubin-Neufchâteau, Tancremont, Battice et Eben-Emael.
Le fort d’Eben-Emael était considéré comme le fort le plus puissant du monde et réputé imprenable…
MAI ’40 – LA CAMPAGNE DE 18 JOURS
…lorsque le 10 mai à l’aube 9 planeurs allemands des 11 prévus et occupés chacun par 8 à 10 hommes, atterrirent sur le fort à proximité des coupoles et casemates! Nous assistions à la toute première opération de commando aéroportée de l’histoire et…un quart d’heure plus tard le fort était pris grâce aussi à une nouvelle arme, la charge-creuse.
Les planeurs DFS-230 capables de transporter une charge utile de 900 Kg. Avaient fait leur oeuvre et le rôle que devait jouer Eben-Emael dans la défense du territoire était terminé !
La 7° Division d’Infanterie et le 2° Régiment de Carabiniers, le long du Canal Albert firent de leur mieux pour contenir l’avance allemande mais ce fut au prix de 224 morts avant d’être submergés.
C’est ici, pour la traversée du canal que furent utilisés pour la première fois les canots pneumatiques qui seraient bientôt connus sous le nom de «dinghy ».
Les autres forts résistèrent de leur mieux mais tombèrent l’un après l’autre devant la force de frappe ennemie.
Battice tomba après 12 jours de combat lorsqu’une bombe de Stuka pénétra par ricochet dans le poste de commande, tuant les 28 personnes présentes.
Tancrémont ne se rendit que le 29 mai, soit le jour après la capitulation de la Belgique.
La route vers Maastricht, la Meuse et Anvers était ouverte.
Le Plan d’Attaque de Hitler :
C’est Hitler lui-même qui, en octobre 1939, planifia l’attaque d’Eben-Emael et décida de modifier le plan d’attaque général qui était initialement de forcer un passage par Sedan. L’idée était de créer une diversion et de pousser les armées alliées à pénétrer en Belgique, facilitant de la sorte la percée de Sedan.
Les Alliés pris par surprise :
La Belgique a compté jusqu’au bout sur le fait que sa neutralité serait respectée. Ce n’est en fait que plusieurs heures après la prise d’Eben-Emael et des nombreux morts dans les rangs belges que l’ambassadeur d’Allemagne à Bruxelles déclara officiellement que l’attaque allemande avait comme unique objectif de sauvegarder la neutralité de la Belgique qui était «menacée par la Grande-Bretagne et la France ».
Le Plan de Bataille Allié :
Deux Corps d’Armée britanniques devaient s’avancer rapidement jusqu’à la ligne Louvain-Wavre où ils opéreraient leur jonction avec les troupes françaises à droite et belges à gauche.
Le troisième Corps d’Armée resterait en réserve à l’arrière.
Notons la présence de la 3rd Infantry Division sous le commandement du Major-Général Montgomery qui allait bientôt s’illustrer à Louvain et plus tard en Afrique du Nord.
Du côté français la 7° Armée du Général Giraud se dirigeait vers les Flandres et Anvers alors que la 1° Armée se déployait entre Wavre et Namur. La Cavalerie des 2° et 9° Armées avança vers la Meuse et leurs éléments légers poussèrent vers Marche, Bastogne et Neufchâteau.
Les unités belges se concentraient sur une ligne Anvers – Canal Albert – Namur. Le Général Keyaerts, commandant le «Groupement K » qui était composé de la 1° Division de Chasseurs Ardennais, de trois régiments de Cavalerie, d’un régiment cycliste et d’un bataillon de motocyclistes, était envoyé sur les hauteurs ardennaises dans le seul but de retarder l’avance ennemie vers la Meuse où était établie la vraie ligne de défense.
La 1° Division de Chasseurs ardennais allait aussi couvrir un front de 85 km le long de la frontière orientale.
Pendant que ceux-ci retardaient l’avance allemande, la division du Général Deschamps devait détruire les ponts et placer des barrages avant de se replier.
Les barrages routiers :
Les destructions sur les routes ardennaises gênèrent beaucoup les Allemands dont l’avant-garde ne disposait pas de matériel lourd. Les Belges avaient créé des zones étanches de 200 mètres de profondeur : 3 fossés antichars de 8 mètres de large et de 4 mètres de profondeur, arbres abattus des deux côtés de la route et s’entrecroisant en travers de celle-ci, des champs de mines…
Ailleurs, c’était d’énormes cratères avec d’un côté un talus et de l’autre un précipice.
Cela ne pouvait tout au plus que retarder l’avance allemande.
Le rouleau compresseur allemand :
Alors que la 6° Armée allemande attaque à travers la Hollande vers la ligne Anvers – Namur, la 4° Armée traverse l’Ardenne de Aachen à Bastogne vers la ligne Namur – Givet.
La 12° Armée attaque vers le sud entre Bastogne et Arlon vers Bouillon et Sedan.
Malgré les actions de retardement en Ardenne et la résistance des forces alliées, la puissance de guerre allemande ne peut être contenue bien longtemps et, l’une après l’autre, nos villes tombèrent.
Liège le 12 mai
Hotton le 12 mai
Ciney le 13 mai
Bouillon le 14 mai
Diest le 14 mai
Yvoir le 14 mai
Couvin le 16 mai
Anvers le 18 mai
Bruxelles le 18 mai
Malines le 20 mai
Gand le 24 mai
Courtrai le 26 mai
Tielt le 27 mai
Diksmude le 28 mai
En 18 jours le rouleau compresseur allemand avait envahi plus de 95% du territoire.
Seuls La Panne, Furnes, Poperingue et quelques villages étaient encore libres, mais seulement jusqu’au 1 juin. Le 31 mai vit en effet les Britanniques se retirer vers Dunkerque dans l’espoir d’évacuer le plus d’hommes possible vers l’Angleterre.
La guerre était finie pour les Belges…et les longues années d’occupation commençaient.
Avec le 28 mai et la capitulation, l’occupation brutale et criminelle se change progressivement en occupation administrative.
Les blindés ayant pour mission de percer les lignes et d’avancer le plus rapidement possible, l’occupation proprement dite était réservée à l’infanterie mais celle-ci avait un retard énorme sur les unités motorisées.
Il y eut donc une période de flottement entre l’envahissement brutal et le début d’une organisation rationnelle. Mais l’ordre et l’organisation allemandes vont bientôt prévaloir et les réfugiés rentrent chez eux pour y subir une longue occupation, la déportation, le travail obligatoire en Allemagne, le rationnement mais aussi parfois pour y organiser la Résistance que l’envahisseur qualifiera de terrorisme et combattra comme tel.
Nous sommes en juin 1940 et il faudra attendre juin 1944 pour voir renaître l’espoir…
Dès juin ’40 les forces d’occupation s’efforcèrent de rallier les Belges à leur conception de « l’Ordre Nouveau ». Ils se présentèrent en « protecteurs » des pays opprimés et de la civilisation chrétienne menacée par le judaïsme.
Beaucoup de Belges remarquèrent chez les Allemands des qualités telles que la discipline, la correction et même la serviabilité. L’occupant cherchait manifestement à obtenir la sympathie de la population et allait bientôt y consacrer toute la force de sa propagande.
Les Allemands réussirent à organiser une presse à leur solde ajoutant la force persuasive de la radio et des actualités cinématographiques à la presse écrite.
Les Allemands étaient passés maîtres dans l’art de mettre au service de leur politique les idées les plus sacrées et faisaient appel au bon sens des Belges et à leur attachement à la religion.
Il était indispensable de réagir tout de suite et de faire face à ces attaques habiles de l’occupant avant que la population tout entière ne se laisse berner.
Heureusement que ceux qui voulaient une Belgique libre et qui avaient une influence morale et intellectuelle comprirent très vite qu’ils avaient le devoir d’éclairer au plus vite la population crédule.
La Résistance fut le fait d’une élite issue de toutes les classes de la société. Ces premiers groupuscules s’étoffèrent progressivement et rallièrent à leur cause la masse de la population consciente du mal fait au pays par l’ennemi.
Dans les premiers mois de l’occupation, la Résistance fut occasionnelle et sporadique. Elle se manifestait sous quantité de formes mineures tel que les graffiti, les obstructions…
Ensuite vinrent les journaux et tracts clandestins qui circulaient sous le manteau.
Pour beaucoup de Belges la Résistance fut une expérience individuelle menée parfois jusqu’à l’emprisonnement et la mort.
Jusqu’à la Libération, des individus luttèrent avec leurs propres moyens dans leurs usines, au bureau, dans la rue…
Exemple : les Allemands ayant interdit la manifestation annuelle du 11 novembre à la Colonne du Congrès, la population bruxelloise s’y rendit en grand nombre le 10 novembre 1940 pour y déposer des gerbes de fleurs.
Mais la Résistance effective, celle qui hâta la victoire, fut le fait de groupes organisés ayant des chefs responsables.
Faute de pouvoir citer ici les centaines de résistants qui furent déportés, fusillés, décapités ou tout simplement abattus lors de combats nous nous contenterons, a titre d’exemple, de citer ici un cas qui nous est proche…Marcourt n’étant qu’a un jet de pierre de La Roche.
Céline COLLIN
« Une des plus radieuses figures du maquis des Ardennes au combat. Jeune fille d’une intrépidité peu commune, courrier diligent, pourvoyeuse en vivres de «baraquiers », avait multiplié les missions pleines de périls et les coups d’audace, sauvant maints réfractaires… » (extrait de :Le Livre d’Or de la Résistance)
« Le soir du 8 septembre 1944, revenant de porter un message à un chef de camp, elle rentrait chez elle dans une voiture transportant des munitions. Au village de Marcouray, l’auto se trouva en face d’un char allemand qui ouvrit le feu. Céline fut atteinte de plusieurs balles et mourut peu après. » (extrait de :Le Livre d’Or de la Résistance)
CITATION A L’ORDRE DU JOUR
Aux officiers et hommes de toutes les Organisations belges de résistance
Maintenant que le sol de la Belgique est presque libéré, je désire en tant que Commandant en Chef des Forces Expéditionnaires Alliées rendre un sincère hommage aux officiers et hommes des groupes de résistance qui, en exécutant mes ordres, se sont battus aussi brillamment. Ils peuvent être justement fiers d’avoir par leur esprit de sacrifice contribué aussi largement à la libération de leur Patrie….
Dwight D. EISENHOWER
…6 Juin 1944-
Le débarquement allié du 06 juin 44, en Normandie, fut une défaite psychologique pour l’armée et le peuple allemand.
Avec un minimum de pertes humaines, les Alliés ont réussi un débarquement massif de seize divisions en cinq jours, soit +/- 150.000 hommes.
Un mois après le débarquement, près d’un million de soldats alliés sont au combat en Normandie.
Commence alors la fulgurante percée au travers de la France d’abord et de la Belgique ensuite.
Au centre, la 1ère Armée US du Gén. Hodges, à sa droite la 3ème Armée US du Gén. Patton et à sa gauche la 2ème Armée britannique commandée par le Gén. Dempsey.
Septembre 44 – la Belgique est libérée
Paris est libérée fin août. Les villes de la côte seront libérées par des unités canadiennes. Tournai, Bruxelles et Anvers sont libérées par les troupes britanniques début septembre. Mons, Namur, Liège et les Ardennes seront libérées dans le courant du mois de septembre par les divisions américaines qui passent la frontière allemande pour la première fois le 12 septembre à Roetgen (10km au sud de Aachen), et s’arrêtent.
Le 10 septembre, La Roche est libérée dans la liesse générale par les unités de la 4th US Infantry Division. La population de La Roche et des environs savoure enfin les plaisirs de la liberté retrouvée après quatre longues années d’occupation allemande. Personne ne se doute qu’elle sera de courte durée.
L’importance du port d’Anvers : Anvers est, à l’époque, le deuxième port d’Europe et sa prise par les Alliés leur permettrait d’accélérer l’approvisionnement de leurs troupes qui avancent vers l’Allemagne.
Mais Anvers est sur un estuaire et sa prise ne servira à rien tant que les Allemands tiendront les rives d’ accès au port. Il est donc indispensable de s’assurer les berges de l’estuaire.
Mais Montgomery qui veut à tout prix effectuer une percée rapide vers la Westphalie, fait la sourde oreille, à tel point que le 22 septembre, en pleine bataille d’Arnhem, Eisenhower lui télégraphie : « …J’insiste sur l’importance d’Anvers. Comme je vous l’ai dit je suis disposé à tout vous accorder en vue de la prise des approches d’Anvers…». La défaite d’Arnhem rendra le Commandant du Groupe d’Armées « Nord » plus accessible aux injonctions d’Eisenhower.
Mais les Allemands sont conscients de l’importance vitale du port. « …Chaque jour supplémentaire où nous refusons l’accès du port d’Anvers à l’ennemi et aux ressources dont il dispose peut être vital. »(Ordre du jour du 7 octobre 1944 du général von Zangen).
La lutte qui s’ensuivit pour les fortifications qui défendaient les approches du port fut meurtrière de part et d’autre.
La prise de l’estuaire : Le Général CRERAR, commandant la 1er Armée canadienne tombe malade et c’est au lieutenant-général Simonds qu’il appartient de conduire l’attaque. . En s’aidant d’inondations les Allemands se maintiennent entre Terneuzen et Knokke et il fallut aux Canadiens utiliser jusque 3 divisions du 6 au 26 octobre pour en déloger la seule 64° Division. Breskens tomba le 22 octobre et le Lieutenant-Général Eberding fut capturé le 1er novembre.
Restait l’île de Walcheren dont la partie centrale était sous le niveau de la mer. 1250 tonnes de bombes eurent raison de la digue qui la protégeait, provoquant d’importantes inondations en son centre. Mais les bords étaient occupés par des défenseurs acharnés de la 70° Division. Il fallut 9 jours à la 52°Lowlands Division britannique et à la 4° Brigade des commandos franco-belgo-anglais du Royal Marines Corps pour venir à bout des défenseurs allemands de l’île.
Le 28 novembre un premier convoi s’amarrait aux quais d’Anvers.
Coût de l’opération :
Le dégagement d’Anvers avait pris deux mois. Deux mois qui allaient coûter fort cher.
12.873 tués, blessés et disparus. 41.000 prisonniers allemands.
Sur la base de 40.000 tonnes par jour, ces deux mois représentent 2.400.000 tonnes de matériel dont l’acheminement en temps voulu eut permis au Général Eisenhower de ne pas stopper ses troupes le long de la ligne Siegfried, donnant ainsi aux troupes allemandes le temps de s’y retrancher.
Ni la bataille de Hürtgen ni la bataille des Ardennes n’auraient eu lieu.
En effet…
Après un repli précipité, les troupes allemandes établissent leur défense le long de la Ligne Siegfried, et l’offensive alliée dans les Ardennes s’arrête aux frontières de l’Allemagne.
A ce moment la frontière allemande était pratiquement ouverte, gardée seulement par des troupes démoralisées, affaiblies et trop peu nombreuses. De nombreux bunkers et fortins de la ligne Siegfried ne sont même pas armés.
La Bataille des Ardennes aurait-elle pu être évitée ?
Alors que le Gén. Patton, avec sa 3ème Armée, veut envahir la Sarre et pousser jusqu’au Rhin, et que le Maréchal Montgomery veut foncer vers Berlin et prendre l’armée russe de vitesse, le Président américain Roosevelt pense à sa campagne électorale et à la conférence de Yalta avec Staline.
De plus, suite à leur avance rapide, les armées alliées doivent faire face à d’importants problèmes d’acheminement de matériel, de nouvelles unités, de carburant et de munitions.
La position de Montgomery : Attaquer sans délai un point précis et enfoncer une flèche droit vers la Ruhr.
La position de Eisenhower : Couvrir un très large front, pilonner les défenses adverses et avancer tel un rouleau compresseur sur l’entièreté du front. Pour cela il devait temporiser, le temps que l’approvisionnement en hommes et en matériel soit complet.
C’est sans doute ce problème d’approvisionnement qui poussa le commandement allié à la prudence et lui fit rater l’opportunité qui se présentait à lui. Décision qui allait lui coûter 6 mois de retard et un grand nombre de vies humaines.
Estimant que le terrain difficile des Ardennes et les conditions hivernales allaient dissuader l’armée allemande d’attaquer dans cette région, le Général Eisenhower, commandant suprême des forces alliées en Europe (S.H.A.E.F.) prit le risque d’affaiblir le secteur.
La temporisation de septembre fut aggravée en octobre et novembre par l’entêtement du Major-Général Collins, commandant le VII Corps a vouloir passer au travers de la forêt de Hürtgen, forêt de 30km. sur 15km, avec des forces trop faibles au lieu de passer au nord et au sud par les couloirs de Aachen et de Monschau. Il n’engagea jamais une division entière en même temps mais tout au plus deux régiments et dut de ce fait faire appel successivement à pas moins de 5 divisions.
La forêt de Hürtgen qui s’avéra en finale une bataille complètement inutile, allait coûter 33.000 hommes sur les 120.000 engagés, un pourcentage jamais atteint auparavant. Pendant la Grande Guerre un pourcentage de pertes de 10% était considéré comme élevé, la forêt de Hürtgen en coûta 25% !
Le long de la frontière allemande, le front allié était couvert du Nord au Sud par la 9ème Armée US du Gén. Simpson, la 1ère Armée US du Gén. Hodges et par la 3ème Armée US du Gén. Patton. Le front des Ardennes était tenu par le Vème Corps du Gén. Gerow avec ses 2ème et 99ème Division d’Infanterie et le VIIIème Corps du Gén. Middleton avec ses 106ème, 28ème et 4ème Division d’Infanterie ainsi que des unités de la 9ème Division Blindée.
Entre la prise d’Aix-la-Chapelle par la 1ère Armée US et la progression de la 3ème Armée US vers la Sarre, le front des Ardennes est considéré comme un secteur calme où viennent se reposer et se reconstituer les divisions américaines.
Période que met à profit le commandement allemand pour préparer une offensive de grande envergure.
L’offensive von Rundstedt – Le plan d’attaque :
Il est ironique de constater que cette offensive allait porter dans l’Histoire le nom de celui qui approuvait le moins le plan d’attaque.
Malgré ses réticences, le Maréchal von Rundstedt allait en effet être rappelé par Hitler parce qu’il avait la confiance des soldats.
Il s’agissait de foncer au travers des Ardennes, franchir la Meuse, reprendre les infrastructures portuaires d’Anvers pour empêcher l’acheminement du ravitaillement et des renforts, couper et isoler l’armée britannique de l’armée américaine, les contraindre à capituler séparément et obtenir ainsi la signature d’une paix séparée sur le front ouest. L’armée allemande de l’ouest pouvant alors être transférée à l’est pour arrêter la progression de l’armée russe.
Toutefois, le succès de l’offensive allait dépendre de plusieurs facteurs importants : une percée initiale rapide avec capture des dépôts d’essence des alliés, le contrôle des importants nœuds routiers, l’élargissement de la brèche pour permettre aux divisions allemandes de foncer au travers de la Belgique, et surtout un plafond bas afin d’empêcher l’intervention de l’aviation alliée.
Le commandement allemand avait décidé que l’effort principal de l’offensive allait reposer sur la 6ème Armée Blindée de Sepp Dietrich, qui devait attaquer par la trouée de Losheim, traverser les collines d’Elsenborn et franchir la Meuse entre Liège et Huy . Au Centre , la 5ème Armée Blindée de Hasso von Manteuffel avait pour objectif de traverser le Schnee Eiffel, prendre St Vith et Bastogne et franchir la Meuse entre Namur et Dinant.
Les flancs de l’offensive étant couverts au nord par la 15ème Armée de von Zangen et au sud par la 7me Armée de Brandenberger.
Afin de créer la confusion au sein des troupes alliées, des groupes spécialement entraînés, parlant anglais et revêtus de l’uniforme américain, devaient s’infiltrer au travers des lignes alliées et entretenir la confusion, la méfiance et la suspicion dans les troupes américaines. Il s’agissait des commandos du Col. Otto Skorzeny, qui devaient s’emparer des ponts de Huy et d’Amay et des parachutistes du Col. Von der Heydte qui devaient sauter sur les Hautes Fagnes et s’opposer à tous renforts des Alliés venant du Nord.
Face aux 80.000 G.I. américains, 245 chars et 590 canons, le Maréchal Model, commandant le Groupe d’Armées B de l’armée allemande, allait déployer 250.000 hommes, 600 chars et 1.900 canons.
LES ATTAQUES ALLEMANDES DE MAI ’40 et DECEMBRE ’44 – similitudes et différences.
À première vue ces deux attaques peuvent sembler fort similaires et l’on se demande comment les Alliés ont pu s’y laisser prendre une seconde fois.
· En mai ’40 les Allemands ont atteint la Meuse entre Dinant et Sedan et sont remontés vers le Nord-Ouest pour enfermer les Alliés en Belgique.
· En décembre ’44 les Allemands ont essayé d’atteindre la Meuse entre Namur et Liège pour ensuite remonter le long du Canal Albert vers Anvers et piéger une grande part des forces alliées en Hollande.
· En mai ’40 les Belges avaient deux divisions de Chasseurs Ardennais à opposer à l’envahisseur et ils ne furent employés que dans des actions de retardement. L’Etat Major avait en effet décidé d’utiliser la Meuse comme ligne de défense et n’utilisèrent l’Ardenne que pour des actions de retardement devant permettre aux forces principales belges, françaises et britanniques de prendre position derrière la Meuse.
· En décembre ’44 cette erreur ne fut pas répétée. Devant la force de l’offensive allemande les Alliés furent placés devant le même choix qu’en ’40 de résister coûte que coûte dans les forêts et sur les crêtes ardennaises ou de se retirer derrière la Meuse. Ils optèrent pour la résistance sur place.
La Bataille des Ardennes – 16 décembre 1944 au 28 janvier 1945
Après quelques reports successifs, c’est finalement le 16 décembre 1944, à 05 h 30, dans le brouillard et le froid, que débute, de Montjoie à Echternach, l’offensive allemande baptisée du nom de code « Wacht am Rhein » (garde du Rhin). C’est un déluge de feu qui s’abat sur les positions américaines, suivi par l’assaut des blindés et des fantassins.
Du côté américain la surprise est totale. N’en prenons pour preuve que l’arrivée à Honsfeld le matin du 16, à moins de 5km du front, de Marlène Dietrich avec une troupe de comédiens venus donner une représentation à des unités au repos !
Les troupes allemandes attaquent suivant trois axes : Malmedy-Stavelot, Saint Vith - Vielsalm et Wiltz-Bastogne.
Le brouillard cloue l’aviation alliée au sol et permet aux unités allemandes de progresser vers leurs objectifs respectifs. Les commandos allemands revêtus d’uniforme américain opèrent efficacement derrière les lignes américaines.
Mais au nord, l’élan de la 6ème Armée Blindée allemande de Sepp Dietrich est brisé par la résistance des 2ème et 99ème Division d’Infanterie.
Seul le groupement blindé SS commandé par le colonel Joachim Peiper de la 1° Panzer Division, de la 6ème Armée Blindée, perce malgré tout en direction de Stavelot et de Trois-Ponts, jalonnant sa progression de massacres de prisonniers américains et de civils, notamment à Baugnez, Ligneuville et Stavelot.
Au sud, malgré certaines difficultés, la 5ème Armée Blindée de von Manteuffel approche avec détermination de St Vith et de Houffalize, et se dirige vers Bastogne.
Pendant ce temps, les premières divisions américaines arrivent à marche forcée pour renforcer Elsenborn, Saint-Vith, Houffalize et Bastogne.
Le 18 décembre, les 82ème et 101ème Division Aéroportée US, en repos près de Reims, sont dépêchées par la route et jetées dans la bataille, dans les secteurs de Bastogne et de Trois-Ponts.
Alors que, suivant leur plan de bataille, les troupes allemandes devaient traverser la Meuse, elles sont toujours confrontées à la résistance des troupes américaines à Saint-Vith et Bastogne.
Les premiers chars allemands, à proximité de Bastogne, entrent en contact avec les points de défense établis par la 10ème Division Blindée et les parachutistes de la 101ème Division Aéroportée, chargés de défendre la ville.
Au même moment, des éléments des 30ème Division d’Infanterie et 3ème Division Blindée américaines, arrivant de Hollande, parviennent avec les parachutistes de la 82ème Division Aéroportée à bloquer l’avant-garde allemande de Joachim Peiper à La Gleize.
Pour les défenseurs américains la situation se dégrade. En effet, dans le Schnee Eifel, deux régiments d’infanterie de la 106° Division, soit près de 6.000 hommes, sont encerclés et faits prisonniers. De plus, la 2ème Division Blindée allemande qui a contourné Bastogne approche dangereusement de Dinant et de la Meuse.
Eisenhower fait appel au XXX Corps britannique :
Le 19 décembre, suite à une réunion de crise à Verdun, le Gén. Eisenhower, ayant un grand besoin de l’appui des unités du XXX Corps britannique pour arrêter et repousser les troupes allemandes qui approchent de la Meuse, décide de redistribuer les responsabilités de ses généraux : la 1st US Army du Général Hodges allait temporairement être intégrée dans la 21st Army Group commandée par le Maréchal Montgomery et ainsi impliquer les unités britanniques dans la Bataille des Ardennes.
Les forces situées au nord de la ligne Givet – Prüm seront donc commandées par le Maréchal Montgomery, et celles situées au sud par le Gén. Bradley, commandant du 12ème Groupe d’Armées US. Il est également décidé que le Gén. Patton mènera une contre-attaque par le sud.
Les unités britanniques du XXXème Corps, commandé par le Gén. Horrocks, seule réserve tactique disponible du S.H.A.E.F., font mouvement et occupent une position d’attente entre Louvain et Maastricht, tout en envoyant des patrouilles de reconnaissance le long de la Meuse : la Guards Armoured Division dans la zone Tirlemont-Diest-St-Trond, la 43rd Wessex Division dans la zone Tongres-Hasselt-Bilzen et la 53rd Welsh Division de Louvain à Ottignies le long de la Dyle.
La 51st Highland Division, qui était au repos dans les environs de Nijmegen, passait sous commandement du XXX Corps et recevait l’ordre de faire mouvement vers Liège d’abord et ensuite vers Louvain.
Enfin, les hommes de la 6th Airborne Division britannique qui espéraient passer Noël en famille étaient mis en alerte. Les conditions atmosphériques ne permettant pas le largage d’unités parachutées, c’est par la mer et par la route que, le 24 décembre, les paras britanniques rejoindront la pointe extrême de l’offensive allemande entre Dinant et Ciney.
Devenue indéfendable, vu la progression des troupes allemandes, les alliés se retirent de Saint-Vith.
Le 22 décembre, la neige tombe sur le front. Les accès de Bastogne sont coupés par les troupes allemandes. La ville et ses défenseurs sont finalement encerclés. Mais les parachutistes de la 101ème Division Aéroportée tiennent bon. A la demande de reddition des émissaires allemands, le Gén. Mc Auliffe leur répondra par son célèbre « NUTS ».
Mais, selon les plans établis, les Allemands auraient déjà dû atteindre Anvers et ses installations portuaires. Le retard est énorme.
Pour les alliés, tous les espoirs se portent maintenant sur la contre-attaque menée par le Gén. Patton et ses unités blindées pour libérer la ville assiégée de Bastogne.
La progression des troupes du Général Patton est cependant rendue difficile par la pluie et la neige. Les hommes étaient épuisés et transis de froid.
Excédé, Patton ordonne à l’Aumônier James O’Neil de rédiger une prière qu’il fit imprimer sur la carte de vœux de Noël distribuée aux officiers et aux soldats de sa 3° Armée. Connaissant bien le Général, l’Aumônier s’efforça de rédiger une prière dans un « style » qui serait accepté par le «Grand chef».
La Prière du Général Patton :
« Monsieur, c’est Patton qui vous parle. La dernière quinzaine fut un véritable enfer. Pluie, neige, encore de la pluie, encore plus de neige…- je commence à me demander ce qui se passe dans votre Quartier Général. De quel côté êtes-Vous finalement ? …
…Vous semblez avoir changé de cheval à mi-parcours. Vous donnez tous les avantages à von Rundstedt qui nous pousse dans nos derniers retranchements. Mon armée n’est ni entraînée ni équipée pour l’hiver. Et, comme Vous le savez très bien, ce temps est plus fait pour des Esquimaux que pour des cavaliers du sud…
…Vous savez, sans que je Vous le dise, que notre situation est désespérée . Il n’est pas nécessaire que je Vous dise que ma 101 Airborne fait face à trois divisions autour de Bastogne. J’y ai envoyé ma 4° Div. Blindée pour essayer de lui venir en aide mais ils trouvent que Vos conditions atmosphériques sont bien plus difficiles à contrer que les forces ennemies…
Je n’aime pas me plaindre déraisonnablement, mais mes soldats de la Meuse à Echternach souffrent comme des damnés. Aujourd’hui j’ai visité un hôpital rempli de cas d’engelures et les blessés meurent dans les champs faute de pouvoir être ramenés…
…mes aumôniers me disent que je dois prendre patience et avoir foi. Foi et patience, mon œil ! Il suffit que Vous Vous décidiez une bonne fois pour toutes de quel côté vous êtes. Vous devez venir à mon aide pour que je puisse anéantir toute l’armée allemande comme cadeau d’anniversaire pour Votre Prince de la Paix…
…Monsieur, je n’ai jamais été un homme déraisonnable. Je ne vais pas Vous demander l’impossible. Je ne vais même pas insister pour avoir un miracle, tout ce que je demande c’est 4 jours de temps clair…
…Donnez-moi 4 jours de beau temps et je Vous livrerai suffisamment de Boches pour mettre vos comptables en retard de plusieurs mois…Amen »
Et au verso, son message de Noël disait : « A tout officier et soldat…je souhaite un Joyeux Noël. J’ai une confiance totale en votre courage, votre dévouement et vos qualités de combattants. Nous avançons avec toute notre force vers une victoire complète.
Puisse Dieu bénir chacun d’entre vous en ce jour de Noël »
L’importance de la météo dans cette bataille :
Le mauvais temps qui sévissait sur le continent européen depuis l’été jusque la fin de 1944, allait être mis à profit par les Allemands lors de leur ultime offensive des Ardennes. C’est sur la base des prévisions de Werner Schwerdfeger, prophète des prévisions météorologiques, que Hitler, qui lui faisait entièrement confiance, décida de la date et de la tactique des premiers jours de l’offensive dans des conditions atmosphériques épouvantables. Le brouillard épais, le froid, la neige, le verglas, les pluies et les boues ainsi que le relief ardennais étaient autant d’éléments peu propices à une attaque d’envergure.
L’aviation Alliée, clouée au sol, n’avait pu se rendre compte des préparatifs allemands au-delà de la Ligne Siegfried et lors de l’attaque elle ne put apporter son soutien aux troupes au sol.
Avec le front enfoncé et Bastogne encerclé il devenait pressant pour les Alliés de connaître l’évolution du temps.
A Reims la 21e Weather Squadron au QG de la 9° Division de bombardement du Major-Général Sam Anderson, surveillait l’évolution du temps.
Le 22 décembre vers minuit le Lieutenant Lloyd Vanderman constatant une humidité très faible, une température en forte baisse et une pression atmosphérique qui montait, dressa un bulletin du temps très favorable justifié par l’aire anticyclonique qui se déplaçait vers l’Est.
Fort de ces renseignements tant attendus et sûrs, Anderson appela la 9e Air Force à Luxembourg. Ceux-ci donnèrent quelques objectifs à Anderson qui ordonna a ses hommes de tenir les bombardiers prêts à décoller.
Notons aussi que pour le simple fantassin dans son trou d’homme ou pour le conducteur de blindé sur les petites routes ardennaises verglacées ou enneigées les conditions atmosphériques constituaient le facteur le plus marquant de cette bataille. Tous les vétérans qui reviennent en parlent encore. Avec, dans la première quinzaine, la boue, la pluie, le brouillard et le froid humide beaucoup d’hommes souffrirent de « trench foot ». Lors de la seconde quinzaine ce fut d’abord la neige et ensuite les grands froids avec des températures descendant la nuit à – 25° et les engelures causèrent presque autant d’évacuations que les blessures de guerre.
Et…à partir du 23 décembre et durant 5 jours, le temps s’améliore. Après le brouillard et les chutes de neige, une période ensoleillée permet à l’aviation alliée de ravitailler les assiégés de Bastogne et de harceler les unités allemandes.
La colonne blindée de Joachim Peiper est définitivement arrêtée et encerclée à La Gleize. Seuls près de 800 rescapés réussissent à traverser les lignes américaines pour rejoindre leurs unités en abandonnant plus d’une centaine de véhicules blindés.
Les blindés de la percée extrême allemande sont arrêtés et détruits en vue de Dinant par la 3rd Royal Tank Regiment britannique et un Régiment de blindés US. C’est l’échec de la percée de la 5ème Armée allemande de von Manteuffel.
…Les Allemands ne franchiront jamais la Meuse et…
…l’objectif tactique devient Bastogne.
Estimant qu’ils ne peuvent plus atteindre Anvers et ses installations portuaires, le haut commandement allemand décide de porter l’effort principal sur Bastogne qu’il faut prendre à tout prix.
C’est Noël ! Militaires et civils essayent de donner une atmosphère de Noël. Mais il n’y a aucune trêve. Sur tous les fronts les combats sont menés avec le même acharnement.
Le lendemain de Noël, des éléments de la 4ème Division Blindée de la 3ème Armée du Gén. Patton décident de foncer vers Assenois, au sud de Bastogne, et réussissent à percer les lignes allemandes et à rejoindre les défenseurs de la ville assiégée.
Le siège de Bastogne était rompu.
Immédiatement un convoi d’ambulances emprunte le «couloir» d’Assenois vers Bastogne et en revient avec des blessés pour les amener dans les hôpitaux de campagne.
Le 30 décembre, c’est l’échec d’une attaque générale lancée par le Maréchal von Manteuffel et sa 5ème Armée Blindée, pour la prise de Bastogne.
De leur côté, les Alliés, sous l’impulsion du Gén. Patton, exercent une pression croissante afin de dégager totalement la ville de Bastogne.
C’est également le début d’une période de très grand froid et de fortes chutes de neige.
Après des journées de durs combats, les troupes allemandes échouent dans leurs tentatives de couper le «couloir» d’accès vers Bastogne.
L’avance allemande est stoppée, la contre-offensive se prépare.
Pendant que se déroule la bataille au sud de Bastogne, les alliés poursuivent les préparatifs d’une contre-attaque générale décidée pour le 3 janvier 45, avec la participation du XXXème Corps d’Armée britannique du Gén. Horrockx.
Les troupes britanniques, dont la 6ème Division Aéroportée, la 51ème Division d’Infanterie écossaise et la 53ème Division d’Infanterie galloise ainsi que les 29ème et 33ème Brigades Blindées, attaqueront entre Dinant et Hotton en direction de la Roche-en-Ardenne.
La 1ère Armée US du Gén. Hodge, avec le VIIème Corps du Gén. Collins et le XVIIIème Corps Aéroporté du Gén. Ridgway, attaquera vers le sud en direction de Houffalize.
De son côté la 3ème Armée US du Gén. Patton, toujours fortement engagée dans les environs de Bastogne, devra pousser son attaque vers le Nord, également en direction de Houffalize.
Le 1er janvier 45, le commandement allemand décide de lancer une grande opération aérienne. Plus de 900 avions prennent leur envol pour détruire les aérodromes alliés et les escadrilles qui s’y trouvent. L’attaque surprend les alliés, mais l’opération de la Luftwaffe est un demi-échec.
ANECDOTE : Le 2 janvier en préparation de la contre-attaque alliée du lendemain matin, un groupe de démineurs enleva les mines anti-char qui protégeaient la petite route montant du village de Mélinnes vers le sommet de la crête près de Soy. Le soir tombant, ils entassèrent ces mines dans le fossé du bas côté de la route.
Le matin du 3 janvier l’attaque fut déclenchée et le premier char descendant cette route, surpris par le verglas, glissa, sortit de la route et explosa sur le tas de mines, tuant non seulement les cinq occupants du char mais aussi les fantassins sur le char et ceux qui suivaient derrière.
Un monument érigé à l’endroit de l’accident nous rappelle cet incident qui ne fut qu’un parmi tant d’autres.
La contre-attaque et la seconde libération de l’Ardenne
Le 3 janvier 45, dans le froid et la neige, débute la contre-attaque générale des armées alliées.
Le Sergent Theodore Draper (84th Inf. Div) rapporte : «L’ennemi fut surpris et des prisonniers furent capturés endormis. Ils ne pouvaient imaginer que nous lancerions une offensive par un temps pareil. Les routes étaient verglacées, la température tomba en flèche et le sol devint comme de l’acier.
Il fallait deux bonnes heures pour percer la croûte gelée de la terre. Il fallait de deux à trois heures de plus pour creuser jusqu’à un mètre de profondeur. Un bon trou de fusilier doit avoir 1m50 de profondeur et c’était pratiquement impossible à réaliser…
…dans ces conditions extrêmes, la façon la plus rapide de geler était de rester couché immobile. Ce qui faisait dire aux hommes que la seule chose pire que ne pas dormir était de dormir ! Ils s’endormaient dans des manteaux quand ils en avaient et se réveillaient dans des «panneaux » de glace !. Les engelures étaient aussi dangereux que les fusils d’en face… »
Malgré cela la contre-attaque se développait de jour en jour et…
Le 8 janvier, prenant conscience de la progression des troupes britanniques et américaines, le haut commandement allemand décide de retirer ses unités du saillant et de réduire le front. Des unités repousseront les attaques des alliées afin de permettre au gros des troupes de se replier et d’établir de nouvelles positions défensives.
Le 11 janvier la ville de la Roche-en-Ardenne est libérée par la 51ème Division Ecossaise, rejointe par une unité de reconnaissance attachée à la 84th US Infantry Division.
C’est également le 11 janvier que, lors d’une reconnaissance, une patrouille du 1st Canadian Parachute Battalion de la 6° Airborne, accompagnée de SAS belges, découvre avec horreur à Bande les corps de 34 civils du village abattus d’une balle dans la nuque par les allemands la veille de Noël et abandonnés dans la cave d’une maison détruite.
La jonction des 1° et 3° Armées U.S. à Houffalize pour fermer le saillant :
Pour refermer le saillant il restait à la 1° Armée au Nord et à la 3° Armée au Sud de réaliser la jonction. L’inimitié entre Patton et Montgomery allait cette fois jouer en faveur des Alliés.
Le 12 janvier, Patton décide que la jonction se fera à Houffalize. Il comptait y arriver le lendemain, avant l’Armée du Nord ; battant une fois de plus Montgomery à la course, comme il l’avait déjà fait à Messine lors de la campagne de Sicile.
Le 13 janvier, le 11th US Armored Division attaque vers Houffalize au départ de Longchamps aux portes de Bastogne.
Le 15 janvier, le 11th Armored Division est encore à 11 km de Houffalize alors que le 2nd Armored Division de la 1° Armée se trouve à Mont à 2 km seulement au nord de Houffalize.
Patton exige que Houffalize soit atteint le lendemain.
Dans la soirée du 15 une partie du bataillon de reconnaissance, sous le commandement du Major Michael Greene, quitte Bertogne et atteint Compogne vers 19 heures. La route directe étant fortement gardée par les Allemands, Greene décide d’aller vers Bonnerue et d’atteindre ensuite Houffalize par un chemin forestier. C’est une colonne de 60 véhicules qui se met en route à 23 heures. Lorsqu’elle pénètre dans les bois il lui reste à couvrir 4 km sur une piste forestière qui débouchait sur la hauteur de Houffalize.
Il lui fallut 3 heures pour franchir le ravin du ruisseau de Suhet dont les bords étaient verglacés et c’est finalement à 6h30 que la colonne déboucha des bois à 1 km de Houffalize.
Il faut noter ici qu’avant de pénétrer dans la forêt le major Greene a envoyé le peloton du lieutenant Lucas en reconnaissance par la route du nord qui aboutissait à un pont à hauteur du Moulin de Rensiwez. S’il trouvait la route et le pont libres il pourrait alors gagner Houffalize par la route venant de Nadrin.
Le 16 janvier à 6h30, Greene débouche de la forêt et avance vers Houffalize où il subit le tir nourri d’un groupe d’Allemands retranchés dans les ruines des premières maisons de la localité. Il déploie son unité et envoie une patrouille franchir l’Ourthe. Cette patrouille va rencontrer une unité de la 2nd Armored Division à 10 heures du matin.
Pratiquement au même moment, le peloton du Lieutenant Lucas, arrivé au Moulin de Rensiwez, y rencontre une patrouille de la 84th Infantry Division qui faisait partie de la 1° Armée.
Le 16 janvier à 10 heures, la jonction était donc faite, en deux points distincts, entre des éléments de la 1ère Armée US du Gén. Hodges et de la 3ème Armée US du Gén. Patton à Houffalize et au Moulin de Rensiwez.
Le saillant allemand est réduit et la ligne de défense allemande recule encore et passe à l’Est de la localité.
Le 17 janvier, ayant atteint tous ses objectifs, le Maréchal Montgomery décide de retirer le XXXème Corps britannique de la Bataille des Ardennes et de l’envoyer aux Pays-Bas afin de se préparer pour la grande opération qu’il projetait depuis longtemps vers l’Allemagne avec franchissement du Rhin : l’Opération Varsity.
Du côté allemand, la 6ème Armée Blindée de Sepp Dietrich quitte les Ardennes pour le front de l’est afin d’arrêter les troupes russes dans leur progression vers l’Allemagne.
Le 28 janvier, l’armée allemande est rejetée sur ses positions de départ de l’offensive du 16 décembre 44.
C’est la fin de la Bataille des Ardennes. C’est également la fin de l’invasion et de l’occupation de nos régions après quatre longues années.
La bataille va s’éloigner vers l’Est, laissant derrière elle son cortège de deuils et de destructions.
Commence alors la campagne d’Allemagne, qui se terminera le 8 mai 45 par la victoire des armées alliées.
Au soir du 28 janvier 45, date généralement retenue par les Américains comme étant le dernier jour de la Bataille des Ardennes, les pertes américaines s’élevaient à près de 75.685 hommes, soit 10.733 tués, 42.316 blessés et 22.636 prisonniers et disparus. Ces chiffres ne tenant pas compte des pertes de l’armée de l’air.
Quant aux pertes britanniques, elles se chiffraient à 325 tués, 239 blessés et 969 prisonniers ou disparus.
Les informations allemandes faisant état de la perte de près de 110.000 hommes, répartis en 12.650 tués, 38.600 blessés et près de 58.580 prisonniers et disparus.
A ces chiffres, il faudrait bien entendu ajouter les 2.500 civils tués par les bombardements, et plus de 200 civils massacrés par les unités allemandes à Stavelot, Trois-Ponts, Baugnez, Ligneuville, Noville, Bande, etc…
De plus, il ne faut pas perdre de vue que, dans la zone des combats, plus de 15.000 maisons ont été rendues inhabitables. Des dizaines de milliers de sinistrés vont ainsi vivre de longs mois dans le dénuement le plus complet.
Mais les villes et villages de l’Ardenne meurtrie puiseront dans la liberté retrouvée le courage de reconstruire les ruines.
REFLEXION :
Si personne ne sous-estime l’importance de la bataille pour Bastogne, il y a lieu de s’accorder sur le sens du mot «importance».
Une bataille importante est celle où l’un des adversaires exerce l’effort principal de sa manœuvre en y engageant le maximum de moyens.
Le 16 décembre 44 les Allemands portaient leur effort principal entre Monjoie et Saint Vith. La bataille cruciale qui allait se dérouler dans ce secteur allait aussi décider de l’issue de l’offensive allemande.
Cinq jours plus tard, la ténacité de la défense américaine obligea le commandement allemand à reconnaître que la 6° Armée Blindée de Sepp Dietrich n’atteindrait jamais les objectifs qui lui avaient été fixés.
La résistance alliée entre Montjoie et Saint Vith ayant scellé définitivement le sort de l’offensive pour Anvers, le commandement allemand décida alors de porter l’effort principal de ses troupes sur Bastogne.
Le siège de Bastogne présentera trois éléments significatifs : le «Nuts» du Général McAuliffe à la demande de reddition des Allemands, les ravitaillements par air et la rupture du siège par les troupes blindées du Général Patton.
Pour l’armée et l’opinion publique américaine, le succès de Bastogne faisait suite à une série de revers. Cette victoire eut sur les états-majors, les troupes et les populations des pays alliés un effet bénéfique.
La bataille pour Bastogne prit alors une allure d’épopée, et Bastogne entrait non seulement dans l’histoire mais aussi dans la légende.
+32 84 41 17 25
Ce site utilise un cookie pour retenir votre paramètre de langue au cours de la session.
En poursuivant votre navigation, vous acceptez le dépôt de cookies tiers destinés à vous proposer des vidéos, des boutons de partage, des contenus de plateformes sociales
Deze site gebruikt een cookie om uw taalinstelling tijdens de sessie te onthouden.
Door verder te gaan met browsen, accepteert u het deponeren van cookies van derden die bedoeld zijn om u video's aan te bieden, knoppen te delen, inhoud van sociale platforms.
This site uses a cookie to remember your language setting during the session.
By continuing your browsing, you accept the deposit of third-party cookies intended to offer you videos, buttons for sharing, content of social platforms